Une expérience qui peut transformer notre regard

Photo : Sophie Tremblay, infirmière clinicienne, équipe de Proximité et itinérance, CLSC Hochelaga-Maisonneuve.

Sophie ne se doutait pas que sa simple participation au dénombrement des personnes en situation d’itinérance allait transformer son parcours professionnel. Infirmière en post-natalité au CIUSSS, elle s’était inscrite comme bénévole par simple désir de s’impliquer dans sa communauté.

« Comme je n’étais pas accompagnée, je me suis assise à une table où il y avait des infirmières, » raconte-t-elle. C’est là qu’elle a rencontré celle qui est aujourd’hui sa cheffe de service. (…) Elle m’a parlé de l’équipe dont j’ignorais l’existence. »

9 mois plus tard, après avoir surveillé les affichages de postes, Sophie rejoignait officiellement l’équipe de Proximité et itinérance du CLSC Hochelaga-Maisonneuve, concrétisant un intérêt qu’elle portait depuis longtemps. « Depuis mon enfance, je souhaitais aider les gens qui étaient dans une situation difficile, » confie-t-elle.

Une nouvelle perspective

Son expérience sur le terrain lui a permis de développer une vision plus nuancée de l’itinérance. 

« Je suis maintenant beaucoup plus sensible au fait que vivre dehors ou en refuge, ne pas avoir de place à soi, c’est terriblement insécurisant. Certains sont en mode survie et sont en stress constant. »

Cette compréhension approfondie contribue directement à la qualité de ses interventions. « Je sais que j’apporte un apaisement à plusieurs de mes usagers et pour certains, je suis une courroie de transmission vers des soins qui, sans notre équipe, ne seraient même pas allés consulter. »

À la veille du dénombrement : un geste concret pour comprendre et agir

Dans quelques jours, des milliers de bénévoles se mobiliseront à travers le Québec pour le dénombrement des personnes en situation d’itinérance. Au-delà des chiffres, cette démarche est une « expérience marquante qui permet en toute humilité de mieux comprendre les divers visages de l’itinérance », comme le souligne la Dre Mylène Drouin, directrice régionale de santé publique pour la région de Montréal.

Pour ceux qui participent, Sophie offre des conseils précieux. « Rester accueillant et bienveillant, éviter les conseils non sollicités » et surtout, se rappeler que chaque personne rencontrée a « des souvenirs, des rêves, des préférences et des besoins ». L’essentiel est d’aborder cette expérience avec « empathie, délicatesse et authenticité ».

L’itinérance en chiffres

Le dernier dénombrement réalisé en octobre 2022 a permis d’identifier 4 690 personnes en situation d’itinérance visible à Montréal et environ 10 000 personnes dans l’ensemble du Québec, soit une hausse de 44 % en cinq ans. Les données montrent que 19 % des personnes recensées déclarent avoir vécu pour la première fois une situation d’itinérance dans la dernière année et que 31 % ont vécu leur première situation d’itinérance il y a 10 ans ou plus.

L’expulsion du logement (23 %) est la principale cause d’itinérance, suivie des problèmes de consommation (21 %), du revenu insuffisant (17 %), des conflits conjugaux (14 %) et des problèmes de santé mentale (12 %), avec des variations notables selon le type de lieu où elles ont passé la nuit du dénombrement. 

Pour le prochain dénombrement, les experts et les intervenants du milieu s’attendent unanimement à constater une nouvelle augmentation de l’itinérance visible dans nos rues.

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